La transformation de nos entreprises, qu’elle soit numérique, méthodologique ou encore comportementale, répond à des prérequis qui ont déjà fait l’objet d’une longue littérature.
Dans le même temps, de nombreux chefs d’entreprise me font part de leur interrogation quant à l’action par laquelle il convient d’engager une transformation. Cette « maudite » transformation dont tout le monde parle et qu’aucune entreprise ne peut ignorer, par quoi commence-t-elle ?
Il est vrai que le caractère protéiforme des points d’inflexion stratégiques du business (impacts technologiques, révolution des business models, modification des relations au travail, etc.) que nous expérimentons avec un rythme de plus en plus effréné, n’aide pas à trouver une réponse unique à la transformation qu’il serait possible de factoriser à toutes les organisations.
Les entreprises n’évoluent pas non plus au même rythme et dans le même monde. La question de la transformation ne se pose pas avec la même acuité dans nos entreprises traditionnelles et patrimoniales que dans nos startups.
Et pourtant, l’expérience sur le terrain de la PME (startup ou non) au grand compte en passant par l’ETI, nous conduit irrémédiablement à un même constat… la transformation se fracasse sur le manque de compétence(s) !
Ce constat frappe non seulement toutes les couches de l’entreprise, mais il est lui-même protéiforme.
En premier lieu, il s’agit de l’insuffisance des compétences fondamentales, celles qui nous permettent de bien faire notre métier. A ce niveau, les entreprises souffrent certes de l’inadéquation de notre système éducatif avec le monde de l’entreprise, mais elles sont également responsables de leur incapacité à bien identifier le savoir-faire de leurs collaborateurs et de les positionner en conséquence à la bonne place.
« Chacun à sa place et les vaches seront bien gardées » dit l’expression.
Par exemple, nous faisons trop souvent face à des chefs de projets qui n’ont aucune maîtrise, même basique, de ce métier et qui n’ont de chef que le titre ! Pour de mauvaises raisons ou parce que l’entreprise ne peut pas embaucher et qu’il importe de « faire avec ce que l’on a », elle va porter gravement atteinte à sa performance.
Il importe également de stigmatiser le total décalage entre la volonté des entreprises d’attirer des talents dans un environnement qui laisse à désirer, en termes d’ambiance de travail, d’état d’esprit, mais aussi de politique salariale. Ce décalage, nous le vivons tant pour les recrutements externes qu’internes. Les entreprises sont exigeantes, pourtant certaines ne se donnent absolument pas les moyens de leurs ambitions.
Réveillons-nous ! Le nouveau monde est en train d’apparaître face à nous. Or, les entreprises, en persistant dans leur volonté de considérer leurs collaborateurs comme des numéros dont le travail, d’une part, ne fait plus sens, d’autre part n’en produit plus non plus, se retrouveront assurément dépeuplées des compétences nécessaires à leur développement. Qui plus est lorsqu’elles feront face aux « Millennials » qui refuseront catégoriquement leurs offres d’emploi.
Pour attirer des compétences, il ne suffit plus d’offrir un emploi avec des avantages, mais un travail qui fait sens, quand bien même le collaborateur est au bout de la chaîne opérationnelle.
Par manque de compétence(s), il faut également entendre les compétences managériales. En janvier 2017, un article du site www.cadreo.com soulignait : « Si près d’un salarié sur 2 déclare ne pas avoir un « bon » chef, bizarrement, ou pas, 94% des managers se jugent « bons ». En cause, un management trop uniforme, jugent les auteurs de l’étude. Mais les managers ont aussi leurs préoccupations. 40% d’entre eux se disent lassés par les changements permanents qu’ils estiment aussi décourageants pour les employés. De même 43% des managers se déclarent démunis face à un nouveau projet. ».
Nos entreprises souffrent cruellement de l’absence d’un véritable middle management, capable de comprendre et d’expliquer les transformations en cours et d’emporter avec lui ses équipes, afin de faire face aux challenges auxquels tout travailleur est désormais confronté.
Faute encore aux entreprises, qui refusent de considérer que soit l’on est manager, soit on peut le devenir si l’on est bien accompagné et formé mais qu’en aucun cas il ne s’agit d’une récompense pour bons et loyaux services ou encore d’une nécessaire promotion parce qu’il n’est pas possible d’augmenter un salaire sans devenir manager. L’aberration est parfois poussée à un tel niveau qu’il existe des managers qui ne managent qu’eux même !
Mener la transformation nécessite des managers d’une nouvelle génération. Ne vous méprenez pas, je ne parle aucunement d’âge. Il s’agit surtout d’un état d’esprit que l’on peut avoir en étant jeune ou senior. Il y a d’ailleurs malheureusement dans nos entreprises beaucoup de jeunes qui sont déjà vieux !
Les défis du quotidien sont tels et les collaborateurs sont tellement déboussolés par les changements successifs et incessants, qu’il importe de s’élever pour être capable de :
- retrouver le sens de nos actions quotidiennes,
- résister au protectionnisme (je ne m’occupe que de mon périmètre) et à l’individualisme (je réalise ma tâche peu importe si au bout de la chaîne le résultat est un échec)
- placer les équipes dans un esprit constructif afin de travailler « AVEC » et non pas « CONTRE » l’autre.
Les managers sont dépassés et leur propre management ne les aide pas. Avant même de parler de management, il importe de s’intéresser au savoir-être. Un bon manager est un manager qui a appris à se connaître et qui va de ce fait gagner en tolérance et en humilité. Il sera par ailleurs curieux d’autrui, en allant chercher les forces de ses collaborateurs et en mettant de côté leurs faiblesses. Il comprendra qu’il obtiendra de la somme des forces de son équipe l’efficacité dont il a besoin pour garder une certaine hauteur afin de gérer les égos, les difficultés ou encore les crises.
Trop de managers, anciennement opérationnels, ont tendance à confondre le soutien aux équipes en faisant le travail à leur place. Ainsi, il les déresponsabilise, alors que les laisser faire leur permet de grandir.
Il y aurait encore beaucoup à dire et un article ne suffit pas. Ainsi, n’avons-nous pas traité du rôle (ou de l’absence de rôle) de la DRH sur les questions que nous avons soulevées ?
Ce que je souhaite mettre en lumière ici, c’est qu’aucune transformation ne peut réussir sans les bonnes compétences à la bonne place. C’est du bon sens !
Certes, ce n’est pas aussi simple. Toute transformation doit s’engager par une réflexion sur :
- les compétences dans l’entreprise,
- la politique salariale qui en découle,
- la présence et le rôle du middle management
- l’accompagnement par la Direction Générale.
Sans cette réflexion fondamentale, point de transformation !